La formation hard rock « ‘77 » nous vient du pays du soleil, l’Espagne, pays néanmoins trop tranquille en ce qui concerne les groupes de metal et de hard, au nombre assez limité. Nous l’observerons ainsi avec d’autant plus d’attention. Ils arrivent en 2010, avec dans leurs cartons, un premier album au titre présomptueux, «
21st Century Rock », qui reste cependant suffisamment téméraire pour encourager à l’achat. L’observateur affiné sera titillé à la simple vue de l’album. Sans l’écouter et sans connaître le groupe, on sait déjà qu’il existe un rapport insidieux avec ce jeune rock band barcelonais, et le groupe mythique « AC/DC », dont il est inutile de présenter.
Tout d’abord, première observation à signaler; « ‘77 », le nom du groupe, ne vous rappelle t-il rien? Non? Et quand je vous parle de l’album « Let There be Rock », sorti en 1977, là ça vous dit quelque chose. « ‘77 » fait évidemment référence à la date de l’explosion d’ « AC/DC », ionisant par la suite les 4 coins de la scène mondiale pour des centaines, peut être des milliers d’années. Autre indice qui ne trompe pas; la pose du groupe sur la couverture n’est pas sans rappeler celle devenue ineffaçable d’« AC/DC » sur leur remarquable « Highway to Hell ». Nous avons donc un jeune groupe bien modeste qui souhaiterait marcher sur les traces des dieux absolus du hard. Vont-ils commettre un blasphème et courroucer leurs idoles, ou seront-ils admis finalement comme de potentiels disciples des maîtres? Pour cela il faut en venir à l’écoute de leur «
21st Century Rock ».
« Gimme Rock n’ Roll » ouvre l’album sur un hard soft, plutôt pas mal au niveau composition, prêt à mettre en boîte. Mais la prestation des instruments reste moyennement animée. De plus le chant d’Armand Valeta , dans sa tentative d’imitation de Bon Scott tarde à convaincre. On ressent une certaine timidité chez tous les membres, une timidité qui leur empêche de prendre en volume et de se lâcher complètement. Les titres suivants, « Hardworking Liar » et « Big Smoker Pig », dans le même registre nous tentent quelque chose de plus élaboré? avec un jeu entre le chant et la guitare rythmique. Le chant ne sort toujours pas de sa bulle, alors que la situation lui était favorisée par les moments d’absence volontaire offerts par les guitares.
Certaines chansons ont l’étrange et la malencontreuse manie de nous faire attendre quelque chose de fort qui n’arrive pas. Le rythme se coince, alors qu’il aurait dû éclater à un moment propice. C’est pour ainsi dire de longues entames. C’est le cas de « Shake It Up », prenant de faux airs, sur ses riffs courts, d’entame de « Highway to Hell ». Mais néanmoins avec beaucoup moins d’effet de vertige que sur le titre chantés par le vrai et authentique Bon Scott. C’est aussi le cas de « Less Talk (Let’s Rock) » qui captive un premier temps sans que l’on puisse espérer grand-chose. Le hard devient plus emballé sur « Wicked Girl »,où les instruments entre chacun leur tour dans une danse saccadée à cent à l’heure. Quelque chose de plus fou, même linéaire, n’est pas déplaisant à entendre.
La formation révèlera la hauteur de son talent sur des chansons au rythme boogie. Là les sonorités sont développées avec plus d’aisance. Même le chant fini par gagner en assurance, prenant facilement son pied. Jusqu’à se rapprocher de l’incarnation de Bon, grâce à un ton plus véhément. C’est du bon boogie que l’on peut entendre sur « Your Gonne’s Over » ou sur « Let the Children Hear Rock ‘n’ Roll ». Plus provocateur et inspiré sur «
21st Century Rock » qui l’allie parfaitement au son hard.
Le summum est atteint par « Double-Tongue Woman » avec un son bluesy, séduisant et rassurant. Puis par moments, le volume augmente, délivrant un son plus dangereux et tout le tranchant des guitares. On retrouve l’esprit inquiétant du dernier titre chanté par notre très regretté Bon Scott, à savoir « Night Prowler ».
On avait beaucoup de mal à être convaincu au début. Le groupe peinait dans son hard, s’obstinant à se rapprocher à tout prix du son d’« AC/DC » période pré-1979, qui restera inimitable. En revanche, dès que la musique calme son jeu pour prendre des airs assimilables au south rock, tout devient subitement plus facile pour les membres du groupe, le chanteur en tête, qui chasse son excès de candeur pour nous offrir quelque chose de réellement renversant. Le spectre de Bon fait alors bizarrement apparition, comme pour venir saluer les périodes d’inventivité du groupe. Un album qui restera encore trop fragile pour que « ‘77 » marche immédiatement sur les plates-bandes du groupe « AC/DC ». Il arrive souvent qu’un premier ouvrage pêche d’un manque de maturité et d’affirmation. C’est à charge de revanche. Eux aussi doivent rêver un jour d’emprunter l’autoroute vers l’enfer.
13/20
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