Tortues aventureuses :Issus de la musique alternative, les membres de cette formation originaire de
Chicago font parler d’eux depuis le début des années 90 par leur cocktail musical empruntant à de nombreux éléments de la musique contemporaine : jazz, lounge, dub, électro, musique industrielle, etc. En cinq albums, le quintet a chamboulé le paysage musicale américain grâce à sa constante évolution musicale tournée vers l’expérimental et l’instrumental. Classés malgré eux dans la catégorie post-rock, ils s’attèlent donc avec joie à brouiller les pistes et se décollent avec brio de cette image beaucoup trop restrictive.
En pleine vague post-grunge, le premier album éponyme,
Tortoise, est un véritable OVNI à l’époque. Un disque instrumental aux longues envolées atmosphériques, tout comme leur deuxième effort,
Millions Now Living Will Never Die, qui en imposait tout autant par sa singularité : preuve par « Djed », véritable patchwork musical de vingt minutes. Mais c’est avec
TNT en 1998 que
Tortoise met tout le monde d’accord : des instruments poussés à leur limite, des influences jazz omniprésentes et des lignes mélodiques d’une rare finesse. Ce succès sera suivi de
Standards en 2001, une approche davantage expérimentale et surtout à forte dose électro, puis All Around You en 2004. Bref, vous l’aurez compris. Ces véritables alchimistes réservent toujours pas mal de surprises ! Que nous ont-ils donc concoctés avec ces 11 titres recueillis sur
Beacons of Ancestorship ?
Les hostilités s’ouvrent avec « High Class Slim came floatin' in », un premier titre atmosphérique aux accents fortement électro avant de glisser vers des influences plus heavy et krautrock. Une sacrée mise en bouche de plus de 8 minutes ! « Prepare your coffin » s’engage sur des territoires plus rock, la basse de Doug McCombs rythmant avec force le morceau à travers les nappes de synthé et les licks à l’exécution fulgurante. Sa grande sœur, le bruyant « Yinxianghechengqi », ne laissera pas vos oreilles indemnes avant de faire atterrir vos neurones avec douceur sur le tarmac. « Northern Something » et « Gigantes » démontrent toute la force de
Tortoise qui parvient à nous prendre aux tripes sans un seul mot, uniquement par la force de sa maîtrise instrumentale et rythmique. Ces deux titres évoquent une certaine urgence, un côté tribal. Imaginez-vous perdu dans une jungle hostile sous forte dose de produits illicites. Vous y êtes ! La deuxième partie de l’album revient vers des climats plus calmes et vaporeux, des morceaux qui ont tendance à traîner en longueur. On retiendra surtout le (trop ?) court « De Chelly », ou la rencontre dans les étoiles entre
Air et
Pink Floyd. Heureusement, le bouquet final « Charteroak Foundation » renoue avec des structures post-rock beaucoup plus évidentes et fait rebondir l’expérience de bien belle façon.
Fidèle à ses expérimentations interminables,
Tortoise nous livre une nouvelle fois un bon album. On regrettera cependant une deuxième moitié globalement moins enlevée et plus plaintive. Délicat à l’abordage, cet opus refroidira rapidement les ardeurs des allergiques aux longues plages de synthé et à l’expérimentation musicale. Mais pour ceux qu’un disque instrumental riche des obsessions mélodiques, rythmiques, sonores et dynamiques des acolytes de John McEntire ne rebiffent pas, vous serez sans aucun doute conquis au fil des écoutes. Un groupe hors du commun, inclassable et indispensable !
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