Ils avaient déjà compris, lors de «
Three Imaginary Boys », que quelques notes suffisaient parfois pour marquer les mémoires. Ainsi, on pouvait deviner toute une histoire dans «
Subway Song ». Avec «
Seventeen Seconds »,
The Cure part explorer ses propres souterrains, et l’instrumental « A Reflection », en l’espace de deux minutes, se montre tantôt dissonant, tantôt monotone, traçant ainsi les grands contours d’un album clair et obscur, entre new wave et
Cold wave. La monotonie qui définit le son new wave, une monotonie particulière, chargée de subjectivité, traduisant l’émotion par le biais des intonations dans la plus grande économie de moyens, en cela fidèle à un tempérament réservé, nordique, se manifeste aussi bien dans l’énergie encore punk de «
Play for Today » que dans la tiédeur de « M », aux accents inconscients de tristesse et de réconfort. La dissonance minimaliste de la
Cold wave, répétitive, souvent en accord avec la mécanique désincarnée de la boîte à rythme, s’empare des plus mystérieux « Secrets », «
Three », « At Night », bien sûr, mais aussi du thème sinistre et discordant de « The Final Sound », semblable aux dernières bribes sonores entendues juste avant de rendre l’âme. Entre les deux, il y a « In Your House », «
Seventeen Seconds » et surtout «
A Forest ». Ce titre évoque le piège, la perte de soi, l'occasion manquée, la frustration, le désespoir, le point de non-retour : « Suddenly I stop, but I know it's too late, I'm lost in
A Forest, all alone. The girl was never there, it's always the same. I'm running towards nothing, again and again and again ». Par-delà son romantisme évident, l’évocation de la femme qui n’est jamais venue au rendez-vous révèle un désarroi existentiel plus général, ne laissant d’autre choix que d’aller au bout du voyage, au cœur de la forêt crépusculaire, que l’on imagine pleine de branches mortes, sous un ciel sombre d’automne ou d’hiver. Pareils aux personnages d’une histoire surnaturelle, étrangers à eux-mêmes, qui en viennent à percevoir comme fantomatique leur propre présence au monde,
The Cure restera dans cette forêt un moment encore. La trilogie ne fait que commencer.
D. H. T.
J'aime les liens que tu tisse entre les trois albums.
Mais c'est pas Siouxsie Sioux qui a créé le Coldwave ?
Sinon, c'est le meilleur album de la fameuse trilogie. Play for Today, M et Seventeen Seconds (surtout cette dernière) sont ceux que j'écoute intensémment presqu'à chaques jours !
Certe, c'est une ambiance que seul The Cure ont pu créer et que probablement personne ne créera plus, pas même eux... Malheureusement.
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