Répétez après moi: Djinn-Vine-Cent(comme le centième de $).
Gene Vincent, à l'américaine, et non pas jène 20-100 (quelle horreur!), ou pire encore, Gègène, ce diminutif abêtissant donné par ses fans franchouillards de la première heure, c'est-à-dire nos parents... en tout cas, les miens, et je n'en suis pas fier!
Gene Vincent and His Blue Caps. Des Blue Caps qu'il a rencontré en 1953, alors qu'il chantait dans une émission de Country d'une radio de Norfolk, sa ville natale. Il chante dans "Country Show Time" depuis qu'il a gagné un radio-crochet, mais ce n'est pas son rêve. Son rêve, c'est devenir un Marine, mais il se fait jeter une première fois parce qu'il a 14 ans, puis une seconde à cause de sa constitution chétive et d'une raideur dans la jambe gauche.
Eugène Vincent Craddock (de son vrai nom) rencontre donc les Blue Caps à Norfolk, Virginie, mais ceux-ci ont dèja pas mal bourlingué, et
Gene est impressionné par l'esprit de groupe qui se dégage de cette formation. Très vite, les Blue Caps adoptent
Gene et il parte sur la route.
Gene adore la Country, le Gospel, les Ballades, les Blue Caps, emmenés par leur guitariste soliste Cliff Gallup, ont exactement les mêmes goûts, plus une propension à jouer du Jazz dûe à la formation musicale de Cliff. Ils lui font également découvrir des groupes de Doo-Wop (donc de la musique de Niggers, quelle horreur pour l'époque!) qui font également forte impression sur
Gene.
Vite repérés, ils enregistrent au début de l'année 1956 un single qui fera un peu de bruit dans le Landerneau, "
Be-Bop-a-Lula", ça vous dit quelque chose, je pense? Ils partent tourner "The Girl
Can't Help It!", avec notamment
Eddie Cochran (qui deviendra le grand copain de
Gene, avant de devenir son plus grand chagrin) et
Little Richard. Ils rentrent d'Hollywood et vont à Nashville pour enregistrer leur premier album.
La face A de ce 33 tours est peut-être ce que l'on peut faire de mieux en matière de Rockabilly, de Swing, de ballades Rock'n'Roll.
Gene Vincent y dévoile toute la sensualité de sa voix, lui qui n'était pas spécialement un Rocker "violent", comme pouvaient l'être Cochran ou
Little Richard, mais plutôt un Crooner, un "vrai" chanteur. Du trio de tête des Grands des 50's (Presley-Vincent-Cochran), on dit souvent que
Gene avait la plus belle voix, la plus douce, Eddie la plus sauvage, la plus rauque et qu'Elvis était le parfait mix des deux. C'est en partie vrai, même si
Gene pouvait aussi envoyer les watts sans avoir à baisser la tête. "Who Slapped John?" en est le parfait exemple, où les Blue Caps répondent à
Gene en poussant des aboiements, toule monde pète les plombs dans le studio, sans Champomy, la fête est moins molle. "Jezebel" (oui, il s'agit bien du "Jezebel" d'Edith Piaf!) est tendu tout du long, nerveuse, sèche.
"Ain't She Sweet?", ça ne vous dit rien? C'est tout simplement la première chanson que les Beatles ont enregistré à Hambourg, quand ils accompagnaient Tony Sheridan. Et bien leur version est entièrement pompé sur la version de l'ami Vincent proposée ici. Et puis "I Flipped", avec son intro contrebasse-riff de guitare, et
Gene qui nous sussurre qu'il "flippe, flippe, flippe, flippe". Mais surtout il y a "Bluejean Bop",
Gene chantant à la perfection des paroles d'une crétinerie absolue, Cliff Gallup humiliant tous les guitaristes de l'époque avec ses solo de guitare teintés de tout un tas de nuances Jazzy, Bluesy et Country, un Dickie "Be-Bop" Harrell qui sera le meilleur Drummeur de Rockab' de l'histoire, le fabuleux Jumpin'Jack Neal (tiens, tiens...) swinguant ses lignes de contrebasse comme aucun n'a su le faire jusque là, Willie Williams soudant le tout avec une rythmique discrète mais bougrement efficace (quel cliché!).
Après un "Waltz of the Wind" qui nous détend un peu, on souffle, on renouvelle les consommations, on change de face et on se dit que ça va se calmer. Bon, ça se calme, mais pas tout de suite; d'entrée, on monte dans le Hot-Rod, et c'est parti pour un "Jump Back, Honey, Jump Back" où tout le monde a droit à son moment de gloire. Solo pour tout le monde, c'est la tournée des Blue Caps. Après, on se calme, quand
Gene nous émeut en raillant ses foutues cloches de mariages qui ont éparpillées sa bande de potes. De rage, ils nous en remet une louche avec "Jumps, Giggles & Shouts". Viens l'heure de la ballade "Up a Lazy River" et d'une nouvelle démonstration guitaristique d'un Cliff Gallup éblouissant de classe tout au long de l'album, si impressionnant que
Jeff Beck le recopie à la note près dans un album hommage. Les gars nous achèveront avec un "Bop Street" devenu un grand classique des reprises Rockabilly des groupes du genre et un "Peg O'My
Heart", qui est peut-être le seul titre dispensable du disque, et encore!
Cet album était le premier album de
Gene Vincent, paru en 1956. Les Blue Caps accompagnèrent
Gene Vincent jusqu'en 1959. Alors que la plupart des chanteurs de Rock'n'Roll jouait avec des musiciens de studio,
Gene, lui, avait son propre groupe. A la fin de leur collaboration,
Gene ne connût plus jamais le succès. Blessé gravement lors de l'accident de taxi qui allait coûter la vie à son ami
Eddie Cochran,
Gene Vincent s'enfonça dans une lente dépression et son alcoolisme le rendit agressif et ingérable. Ses multiples téenregistrements de "
Be-Bop-a-Lula", la plupart du temps d'un niveau médiocre, voire nuls par rapport à l'original, ne lui permirent pas de sortir de la misère. Il mourût le 12 octobre 1971, dégueulant le sang sur le perron de la maison de sa mère.
Les Blue Caps s'appelaient les Blue Caps parce qu'ils portaient des casquettes bleues en hommage au président Eisenhower. Il fallait quand même le dire. Comme il fallait dire aussi que cet album se classa 16ème au Billboard, ce qui est remarquable, la majorité des chansons et des groupes de l'époque étant édité en singles.
Et qu'il est bien connu que le fantôme de Gègène rôde toujours, la nuit, à Paris, du coté de la Mutualité...
HotRodFrancky
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