J’aime comparer le rock à des montagnes russes. C’est un peu tiré par les cheveux certes, mais une fois expliqué, cela prend tout son sens. Par exemple, après la fin du punk, les gens annonçait la mort du rock : grosse descente. Mais soudain, venant de nulle part arrive la new-wave et le post-punk qui redonne ses lettres de noblesse au rock : grosse montée. Autre exemple, en deuxième moitié des 80s on croyait le hard-rock éteint et pouf, « Appetite For Destruction » remet tout le monde à sa place et fait un tabac. Enfin, vous avez compris ce que je voulais dire. Mais en 2010, période de quasi-désert musical, qui allait prendre la relève et faire remonter le wagon ?
The Black Keys entre autre.
Après «
Attack and Release » sorti en 2008 qui fit un joli succès mine de rien, le groupe est attendu au tournant. «
Brothers » sort donc en 2010 mais contrairement à son prédécesseur, le producteur Danger Mouse n’est pas de la partie hormis sur le single « Tighten Up ». Alors, cet album est-il le messie tant attendu ? La réponse est …
… oui, du moins il en a l’air. «
Brothers » a en effet été un succès critique et commercial, faisant de
The Black Keys l’un des groupes les plus importants du 21ème siècle. La pochette est assez minimaliste et reflète bien le style du groupe : deux membres, Dan Auerbach (guitare, chant) et Patrick Carney (baterie) avec une forte tendance pour le blues-rock lo-fi et minimaliste, avec très peu d’accompagnement (si cela vous rappelle les White Stripes, vous n’êtes pas seuls). On s’attend donc à un retour aux sources, où le rock n’était qu’énergie et composition, quasi pas de post-production et une tendance à la simplicité.
Sur cet aspect, «
Brothers » tient ses promesses. Les influences du groupe sont visibles voire flagrantes dans certains morceaux. Par exemple, l’instrumentation de « Everlasing Light » ressemble énormément à celle de Mambo Sun de T-Rex (« Electric Warrior », 1971) avec des power chords très marquées et quelques frappes de batterie pas incroyablement technique. « She’s Long Gone » porte également la marque d’un rock bluesy des origines, avec un riff de guitare lent et élégant, et une batterie supportant bien le rythme. L’instrumental « Black
Mud » baigne lui aussi dans cet agréable aspect retro, notamment à cause du son un peu vintage des amplis et des quelques bridges sympathiques le traversant.
Mais les Black Keys ce n’est pas que faire du neuf avec du vieux, c’est aussi faire du neuf tout court. Et même sur ce terrain, il faut admettre qu’ils s’en sortent bien les bougres ! J’en veux pour témoin au moins les deux singles de l’album : « Tighten Up » et « Howlin’ For You ». Le premier est beaucoup plus énergique que les titres précédemment cités notamment grâce au refrain entrainant et à un chant plus puissant. La guitare est aussi très « dansante » grâce à la production de Danger Mouse (qui s’occupera de leur prochain album «
El Camino » beaucoup plus rythmé) d’où le choix de « Tighten Up » en single pour séduire les foules. « Howlin’ For You » est assez différente de la chanson précédemment citée. Sur celle-ci, ce sont les claviers et la batterie qui prédominent : la guitare est quasiment absente. Cependant, les claquements de mains ainsi que le refrain très très très simple ne peuvent qu’inciter à reprendre ce titre en cœur. Malgré cet aspect neuf, le son, lui, reste résolument rétro sur ces chansons pour un rendu réussi.
Alors, avait-on raison de croire en les Black Keys pour la résurrection du rock ? Et bien j’affirme que OUI, un bon gros oui dans les dents de tous ceux qui croyaient le rock mort. Avec des hommages plus ou moins directs, les Black Keys ont réussi à faire revivre les vieux genres en les modernisant, ou au contraire en vieillissant le son de leurs chansons plus modernes pour leur donner un aspect retro. Le groupe revient donc à la vieille définition du rock : une guitare, une batterie, quelques accompagnements par ci par là et rien de plus. «
Brothers » est un disque sur lequel se jeter, à la jonction entre le rétro et le neuf : l’avenir d’un genre qui n’a pas fini de nous surprendre.
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