Nous sommes le 11 septembre 2001. Pour ma part, à l'heure de ma pause déjeuner, j'avais rendez-vous à Paris avec mon meilleur pote dans les locaux d'une grande enseigne de vente de disques. Et pourquoi ce jour-là ? Tout simplement parce que c'était la sortie du nouvel album de "Noir Déz" bien sûr ! Objet tant attendu et convoité par les fans que nous êtions alors, et que j'avoue être encore aujourd'hui.
On s'était déjà procuré un extrait, paru sur un mini CD "Quai 213 - Première Mutation" recueil de textes de poètes et où figurait "Des Armes", un texte magnifique de Léo Ferré, mis en musique par Noir Désir.
Il faut dire que depuis "666667 Club" en 1996, nous n'avions rien eu de nouveau à nous mettre entre les oreilles de la part du combo bordelais... Si on fait exception de l'album de remixes paru en 1998, intitulé "One Trip, One
Noise". Et bien justement : parlons-en de cet album de remixes car c'est tout simplement le point de départ de cet album "
Des Visages, des Figures" !
L'idée était partie de confier des "masters", des bandes originales des enregistrements de ND à divers artistes et DJ's, de Treponem Pal à Telepopmusic en passant par Yann Tiersen (magnifique version d'"A Ton Etoile"), qui ont repris des morceaux de ND à leur sauce. Si le résultat a été surprenant pour les fans, il l'a été également pour le groupe qui a pris alors conscience que leurs créations pouvaient être vues, vécues, perçues et fabriquées différemment.
Forts de ce constat et de cette découverte, ils sont alors repartis en studio, mais avec une autre optique, de nouvelles idées et... de nouvelles compos.
Dans une interview de l'époque, Bertrand Cantat a déclaré « Nous avons pris une direction que nous n’avions jamais eu le courage de suivre, que nous n’aurions jusqu’ici jamais assumée. La façon dont nous avons traité ces chansons est en rupture avec nos précédents albums. »
Résultat ? 12 chansons, que je trouve inégales à titre perso. Je mets de côté la dernière plage, un morceau -délire ?- long de 23 minutes avec Brigitte Fontaine. (L'Europe). Si certains ont crié au génie -le texte est puissant-, pour ma part, rien que les premiers mots prononcés par Brigitte Fontaine "Les Sangliers sont lâchés", et j'ai déjà envie de zapper !
De côté également le premier single -avec
Manu Chao à la guitare- qui en sera tiré "
Le Vent Nous Portera", et qui va bientôt cartonner partout sur toutes les radios et qu'on a (trop ?) entendu, à l'instar des "Sombres Héros" quelques années plus tôt.
Le style de cet album est surprenant. Beaucoup plus calme, beaucoup d'instruments; de la trompette de poche aux synthés (Bertrand Cantat), aux vibraphones, xylophones et tambourins (Denis Barthes le batteur), cithare, sampler et autres guitares baryton (Serge Tayssot-Gay), sans oublier synthé et orgues du bassiste (Jean-Paul Roy).
Les fans peuvent être déboussolés ! Ce n'est pas le Noir Désir de
Tostaky ou de Veuillez Rendre l'Ame ! Pourtant la voix de Cantat est toujours aussi magnétique. Un souffle, qui dit mieux ? L'équilibre est fragile.
Et puis la magie opère et arrivent les bijoux. "Des Armes" déjà évoqué plus haut est si belle. Dénudée, c'est pourtant elle qui nous fout à poil ! "A l'envers, à l'endroit" et son texte ciselé, "
Lost", "Son Style 1" pour nous rappeler qu'on écoute quand même du noir Déz ! Ouf. On est rassurés. La bête ne faisait que ronronner...
Et puis "Bouquet de Nerfs". Pour moi, presque au niveau des "Ecorchés", en tous cas qui s'en approche, et qui en serait une suite logique.
Enfin, celle qui résonnera toujours particulièrement à mes oreilles, et qui s'intitule "Le Grand Incendie", illustrée en page intérieure du livret du disque par une statue de la Liberté incandescente sur un fonds de New York en flammes... "Ca y est, le grand incendie, y'a l'feu partout, emergency".
Cet album, qui sera le dernier en studio de Noir Désir, laisse un goût d'inachevé. Le virage était pris, et la tournée qui a suivi le démontrait. Noir Désir évoluait, et ... leurs prestations gagnaient en intensité ce qu'elles avaient perdu en spontanéité. Pas sûr qu'on perdait au change.
HRF
Merci pour ton texte de passionné.
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