Même s’il est vrai qu’Opposition, bien que post-punk, a aussi des affinités avec le reggae, l’influence du funk chez eux n’a jamais été négligeable, bien au contraire. Il suffit d’écouter « Five Minutes » pour s’en convaincre. Mais ce n’est pas encore le mélange de rock et de funk que développeront, sur un mode très électrique, les
Red Hot Chili Peppers, ou même
The Cure à ses heures perdues (période «
Kiss Me,
Kiss Me,
Kiss Me »). C’est plutôt un mélange de rock et de funk fortement ancré dans le son synthétique des années 1980, que Brian Ferry reprendra à son compte, entre autres sur l’album « Bête Noire ». « Abusing Words », « Fool for You » et « First Suspect », eux, vont plus vers le reggae et ne sont pas, de ce fait, sans ressemblances avec Police, surtout que Mark Long n’a pas une voix de basse, ce qui lui fait un point commun avec
Sting. Le précédent «
Promises » n’avait pas tellement exploité ce trait, plus flagrant ici. «
Empire Days », au fil des quatre premiers titres, s’affirme d’ailleurs avec plus de force, notamment parce qu’il y a davantage de distorsion au niveau des guitares. « Susan Gets By on
Love » marque une pause guitare acoustique. Une autre référence qui vient à l’esprit, c’est celle de
Christopher Cross : quand on écoute « If That Wasn’t
Love », au niveau des instruments, des arrangements et de la production, on dirait un peu « Sailing ». Et tout cela confirme un autre aspect qui n’a rien d’anodin : les groupes qui évoluent dans une relative confidentialité ne méprisent pas systématiquement le son commercial de leur époque ; ils peuvent même l’apprécier et s’en inspirer. C’est ainsi que le groupe The Cassandra Complex, par exemple, citait
Eurythmics parmi les artistes auquel il voulait rendre hommage. Du reste, Kenny Jones, le producteur d’Opposition, aura travaillé aussi bien avec les Rolling Stones qu’avec Björk. De « Someone To Talk To » à « War Zone » en passant par « Mr Cleanum », on a une évolution du plus rapide au plus lent, avec un regain d’intensité à la fin. Les méditations de « Who’s Been Telling You Lies ? » et de « The World’s First Vitaphone Announcement » indiquent que l’auditeur se trouve au cœur de l’intimité de l’album. Au cours de ces cinq derniers titres, on est passé d’une relative évidence à une écoute demandant plus d’attention. «
Empire Days » s’attache à conclure, fort d’une basse qui, loin de se cantonner à un rôle de transition entre la batterie et les autres instruments (lesquels jaillissent régulièrement, soulignés par les accords de synthétiseur, comme des rayons de lumière), remplit une fonction mélodique plus poussée. Les cinq titres bonus prolongent cette atmosphère où l’on aime se perdre dans ses propres pensées, en laissant filer le temps. Moins poussif que «
Promises », car d’un pathos moins appuyé, «
Empire Days » donne l’occasion à Opposition d’atteindre un très bon niveau d’ensemble sur un projet d’album.
D. H. T.
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