1975, dans une prison, deux hommes enfermés pour état d'ébriété aggravé.
Van Zant : Ca fait combien de fois que tu te retrouves en taule?
Rossington : Deux ou trois fois, je suppose.
Van Zant : Tu sais quoi? J'étais en train de compter et c'est la onzième fois que je me retrouve ici.
Rossington : T'es vraiment qu'un fouteur de merde, Ronnie. (You're just
Double Trouble, Ronnie).
Van Zant (claquant des doigts) : On devrait faire un titre la dessus.
"
Double Trouble", le premier morceau de l'album "
Gimme Back My Bullets" venait de trouver ses bases...
Ce début d'année 1976 marque une nouvelle évolution chez
Lynyrd Skynyrd. Le groupe s'adjoint les services de trois sympathiques choristes, Leslie Hawkins, Cassie Gaines et JoJo Billingsley. The Honkettes (c'est le nom le plus connu qui leur a été donné, mais on en retrouve un autre dans les crédits de l'album, The Honnicutts), ne seront jamais considérées comme étant partie prenante du line up officiel.
A peine un an aprés
Nuthin' Fancy, le groupe nous livre une nouvelle production. "
Gimme Back My Bullets" devait initialement s'intituler "Ain't No Dowd About It" en hommage au producteur du même nom (Tom Dowd), car le groupe l'adulait. Dowd était connu pour son travail avec Clapton (le titre Layla) ou avec
The Allman Brothers Band et
Cream. Les musiciens l'avaient d'ailleurs surnommé Father Dowd.
L'enregistrement sera laborieux. Sous la houlette de Dowd,
Lynyrd Skynyrd ne mettra pas le disque en boite en une seule session. La plupart des titres seront d'ailleurs composés en studio, contrairement aux fois précédentes. Une fois de plus la pression du label n'est pas étrangère à cet état de fait. Le groupe lui même n'est pas sans reproches car les musiciens pensaient pouvoir composer dans n'importe quelle situation. 4 des titres de l'album seront enregistrés en septembre/octobre 1975 et le reste au retour d'une tournée européenne en novembre. Le discours du groupe sera dithyrambique à l'occasion de la sortie officielle. Jamais ils n'avaient étés aussi content de la production, de la manière de travailler, du mixage ou de la liberté accordée par le producteur. Les ventes démarreront sur les chapeaux de roues..."
Gimme Back My Bullets" sera le seul album sorti avant la tragédie de 1977 à ne jamais être devenu platine, même de nos jours.
Alors que la réputation du groupe s'est forgée autour d'un trio de guitaristes, "
Gimme Back My Bullets" fait office d'exception puisque enregistré seulement par Collins et Rossington. Ce semi échec conforta
Van Zant et Collins dans l'idée qu'une troisième gachette était indispensable pour le groupe. Un paquet d'auditions infructueuses s'ensuivirent, avec quand même des pointures comme
Leslie West (
Mountain). Mais, comme souvent dans ces cas là, et comme ils l'ont racontés plus tard, la solution était sous leurs yeux. Cassie Gaines n'arrêtait pas de vanter les talents de compositeur et de guitariste de son jeune frère, Steve. Celui ci avait son propre groupe, Crowdad, et reprenait régulièrement "Saturday Night Special" en live. Son premier essai eu lieu sur scène, le 11 mai 1976, à
Kansas City. Le groupe l'invita aussi sur quelques autres dates pour jammer, avant de l'intégrer définitivement en juin 1976.
Et donc, alors cet album?
Comme on ne change pas une formule qui gagne, on retrouve la sempiternelle photo du groupe sur la pochette de l'album. Celle ci est particulièrement ratée. Divisée en deux couleurs, avec la partie droite sur fond rouge, certains musiciens ont l'air relativement fatigués au sortir du bar devant lequel ils posent, bières à la main.
Pour ce qui est de la musique en elle même, rien de bien neuf ne vient pimenter l'écoute de cet opus. Le groupe semble se reposer sur ses lauriers et ne propose pas d'évolution par rapport aux précédentes sorties. Ronnie
Van Zant posséde toujours une voix qui fait mouche au niveau des émotions à faire passer, la section rythmique tient la route, mais comme dit plus haut, il manque quelque chose au niveau des guitares. La poudre aux yeux qui consiste à balancer plein de petits riffs un peu partout dans les titres ne fait pas vraiment effet. Les longues envolées de guitares à la Freebird semblent faire partie d'un passé révolu.
L'album s'ouvre sur le titre éponyme qui deviendra, comme pour les deux disques précédents, l'un des standard de
Lynyrd Skynyrd. Finis les one, two, three, four, et les blah blah de début d'album, on part directement sur la musique, changement de producteur oblige. Mais, même si leur travail reste remarquable, on sent les deux guitaristes orphelins de leur ancien compère, Ed King.
L'ombre de
ZZ Top est toujours là et le blues est toujours bien présent ("I Got the Same Old Blues, sa slide et son harmonica, "
Double Trouble"). Il y a aussi un peu de Rock N' Roll avec "
Trust", et, bien sur, pas mal de Country. Les choristes feront un travail remarquable d'accompagnement et de soutien à
Van Zant sur "
Double Trouble"
Le piano de Powell retrouve quand même une seconde jeunesse ("Every Mother' Son, "Roll Gypsy Roll", "Cry for a Bad
Man"), par rapport à "
Nuthin' Fancy". On le sent un peu plus présent dans le mix de l'album, ceci expliquant peut être cela.
Les ballades sont toujours de la partie ("Every Mother' Son", "All I
Can Do Is Write About It"), mais peu de choses les distinguent des slows Country de l'époque. C'est presque fade et sans âme. Certains titres laissent un gout d'inachevé comme "Roll Gypsy Roll" qui dure moins de trois minutes et se finit sur un fade out rapide, là ou sur les albums précédents, on aurait eu un combat guitaristique sans fin. Tout comme "
Gimme Back My Bullets".
Ne soyons pas complétement négatif. Il reste quelques belles envolées de guitares (le final de "Every Mother' Son", ou celui de "Searching"). Quelques titres sortent quand même du lot. "Roll Gypsy Roll", par exemple avec sa mélodie au piano et ses similitudes flagrantes avec des titres phares du premier album, "
Double Trouble" ou "All I
Can Do Is Write About It".
Rare point vraiment positif : L'album ne dure qu'un peu plus de 37 minutes...
"
Gimme Back My Bullets" semble être un concentré de ce que le groupe pouvait faire de pire, du visuel à la musique. Les critiques de l'époque ne l'épargneront d'ailleurs pas. Pourtant, au fil des ans, cet opus semble avoir trouvé ses fans et on peut maintenant lire beaucoup de critiques positives un peu partout.
De retour avec une formation à trois guitaristes, le groupe repart une fois de plus sur les routes...
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