Après le premier volet de la trilogie dite berlinoise,
Low, voici le second volet,
Heroes. Placé dans une ambiance de travail et de création nouvelle depuis qu'il s'est associé avec
Brian Eno,
David Bowie semble intarissable et exploite de nouveau tous les atouts de la musique électronique allemande et de la new wave, encore embryonnaire et sous-jacente du punk. Par rapport à
Low,
Heroes va marquer en plus d’une suite artistique un succès commercial important qui lui donnera la stabilité dont il manquait depuis quelques années.
L’album est à diviser en 2 parties. La première partie est composée de titres mêlant electro pop rock dansant hérité de
Station to Station et ton new wave initié par
Low, et absolument tous les titres y sont des hymnes à eux tous seuls. Les bondissants
Beauty and the Beast, Joe the Lion et Blackout combinent parfaitement la rythmique puissante et lourde du punk à des éléments issus de la soul, de la pop ou de l’electro, que Bowie se charge d’assembler à sa sauce et de manière on ne peut plus originale.
Heroes, le morceau éponyme, est sans doute l’un des joyaux pop les plus éblouissants de sa carrière, il y emprunte le côté planant et épique de
Space Oddity, mais dans un contexte instrumental plus moderne, et y ajoute ses mélodies toujours aussi resplendissantes et sa voix, tantôt silencieuse tantôt déchirante, qui complète admirablement ce bel ensemble. Sons of the Silent Age est à mettre à part, car il semble issu de
Hunky Dory, une pop aérienne moins électronique mais tout aussi séduisante. La seconde partie est totalement instrumentale, ce qui de prime abord déçoit assez cruellement tant les 5 premiers titres avaient laissé une forte impression. Si ce n’est pas ce qu’on attendait au départ, cette seconde partie se révèle au fil des écoutes d’une richesse sonore épatante. V-2 Schneider est le titre qui bouge le plus, véritable écho à la musique de
Kraftwerk, il allie parfaitement des sonorités modernes à une accroche immédiate. Les 3 autres titres sont beaucoup plus planants, voire même silencieux, et ne laissent pas tous la même impression. Sense of Doubt est le plus sombre, presque sorti d’un film d’horreur avec ses macabres notes de piano, tandis que Neuköln est d’une beauté bouleversante, seul Moss Garden déçoit, car trop silencieux et assez ennuyeux. En guise de conclusion, Bowie retourne au style de la première partie avec un The Secret Life of Arabia qui ne souffre pas de la comparaison, mêlant avec toujours autant de génie les sonorités electro, le ton new wave, la rythmique puissante et la touche soul.
Nouveau gros morceau de la discographie de
David Bowie,
Heroes est l’archétype même de l’album bowien post-glam, où les ambitions expérimentales ne prennent pas le pas sur l’accroche et le plaisir d’écoute de chaque titre. Plus que jamais, le caméléon anglais préfigure l’approche et le ton de la new wave, et tandis que le mouvement explosera l’année suivante, lui se chargera de terminer sa trilogie berlinoise avec
Lodger.
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