Moby est une source intarissable de détente et d'émotions. J'ai découvert ce DJ chauve à l'apparence chétive et timide quand j'avais 10 ans. Mon père m'avait offert une boîte noire contenant un double CD : «
Play » et «
18 ». 11 ans plus tard, j'écoute cette musique avec la même nostalgie, le même plaisir. Le plaisir d'écouter un artiste composant essentiellement pour lui, pour son plaisir de développer son univers onirique, électronique, très ambiant et reposant.
Beaucoup plus en retrait depuis un «
Hotel » plus rock, je n'ai jamais cessé de me pencher sur les avancées plus discrètes du DJ américain. Enfermé dans son studio depuis plus de dix-huit mois à pondre la suite d'un «
Destroyed » mélancolique et froid, l'artiste s'est entouré de six amis pour fonder ce «
Innocents ».
" Les
Innocents sont devenus le thème qui a inspiré l'album, incluant la vulnérabilité humaine et le désir de la connexion entre humains, tout en célébrant l'imperfection dans un monde qui, trop souvent, prône en haute estime une perfection irréaliste et artificielle. " - Richard "
Moby" Melville.
Extrêmement discret et modeste malgré plus de 20 millions d'albums vendus, le compositeur n'a, pour son onzième album, plus rien à prouver. Libre et sans aucune forme de pression, «
Innocents » n'est ni une évolution, ni une régression. Il avance avec son temps, prenant le temps de s'ouvrir à nous par une communication s'étendant depuis déjà plusieurs semaines.
Quand «
Innocents » se présente à nous, nous sommes toisés de haut par treize personnes portant des masques d'animaux (treize apôtres ?
Moby étant croyant, cette inspiration ne serait pas étonnante). « Everything That Rises » ouvre l'album, la patte
Moby se ressent. Ces samples de voix répétitives, ces percussions hypnotisantes, ces nappes de claviers grandiloquentes ... La boucle atmosphérique se répète inlassablement, c'est juste beau. Qu'importe que ça soit du déjà-entendu, ça transporte, on ne demande que ça, au fond.
Six personnes interviennent vocalement sur cet album. À deux reprises, on retrouve le timbre soul et élégant de Cold Specks, la voix planante de Damien Jurado (musicien américain de Rock Indépendant), la voix douce et mélancolique de Skylar Grey (très connus pour ses nombreux featurings avec des rappeurs comme Eminem ou Dr. Dre), la crooneuse Inyang Bassey (qui a déjà participé sur l'album «
Destroyed ») Wayne Coyne (du groupe
The Flaming Lips) et enfin
Mark Lanegan (ex chanteur de
Queens Of The Stone Age, notamment).
Si les featurings sont ainsi plus nombreux,
Moby les entrecoupe régulièrement de ces longues plages d'ambiances dont lui seul a le secret. L'ambiance symphonique et le piano de «
Going Wrong », la World-Music hypnotique comme seul lui peut le réaliser avec « A Long Time » ou encore les rythmes plus puissants et lourds de « Saints », digne B.O d'un film d'action.
Cold Specks apparaît à deux reprises, imposant une soul magnifique et atmosphérique sur le single « A Case for a Shame », magnifié par son piano et son rythme lent, tout l'inverse d'un « Tell Me » plus électronique et glaciale, ponctué de somptueux effet que beaucoup pourront trouver trop grandiloquent. Dans un registre de voix du même univers, Inyang Bassey accompagne l'expérimentation jazz/blues à la tessiture Trip-Hop d'un « Don't Love Me » de crooneur.
Comme la plupart des albums de
Moby, de superbes balades prennent place. La douce mélancolie et la voix céleste de Damien Jurado nous portent tout le long de la magnifique « Almost Home ». Dans une ambiance non éloignée de «
18 », « The Last Day » est l'un de ces titres magnifique dont
Moby garde le secret. La structure progressive et minimaliste du morceau et ces samples incantatoires derrière la sublime voix de Skylar Grey nous conteront une poésie touchante sur la fin des temps.
« The Perfect Life » fait déjà beaucoup parler. En bien et en mal. Ce titre tranche radicalement l'ambiance de l'album. Le duo avec Wayne Coyne est terriblement joyeux, l'ambiance
Gospel qui sort de la dizaine de voix composant les chœurs et l'atmosphère pop-rock fait office de single commercial tout trouvé. Cela sera à la convenance de chacun, j'aime ce titre, son clip amusant et son atmosphère légère. «
The Lonely Night » et son ambiance crépusculaire (sublime clip ici encore) sur la voix caverneuse et délicate de
Mark Lanegan. La mélodie est minimaliste et épurée, reposante.
L'album se termine sur une longue pièce de neuf minutes, « The
Dogs ». L'ambiance est rock, mais extrêmement calme.
Moby y est seul derrière le micro, on reconnaît sans peine son timbre de voix si particulier, pas forcément juste, mais toujours empreint de la même émotion et sincérité. À la moitié du titre,
Moby coupe le micro pour laisser l'ambiance musicale clôturer «
Innocents ».
Que dire ... «
Innocents » n'est pas une pièce d'originalité dans la discographie de
Moby. Et alors ? Le fait de ne pas être surpris ne nous empêche aucunement d'être happé dans l'atmosphère intimiste du musicien. «
Innocents » n'est qu'une pierre de plus sur le chemin spirituel et profondément délicat qui relie cœur et esprit dans une même entité. De la nostalgie, de la beauté... Le voyage est toujours magique.
Moby restera toujours l'un de ces artistes magiques transcendant sans peine les émotions.
A voir, en tout cas tu a éveiller ma curiosité !
Une chronique réussi donc !
Merci
Après oui, je conçois que depuis la doublette « Play »-« 18 », Moby est resté dans une certaine facilité, dans son style, sans trop le chambouler ... Et cet album s'inscrit dans la continuité de sa carrière. Mais j'aime tellement ce qu'il fait que je me laisse chaque fois aller à planer dans son monde ...
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