Aussi petit qu'il en a l'air, "
Jar of Flies" a de quoi tenir tête à ses grands frères; pour cause, il fut enregistré en à peine une semaine et bien que contenant pas mal de pistes acoustiques, il fut certifié double disque de platine en 1995! Une éclatante preuve du savoir-faire musical et de la capacité d'un groupe comme
Alice in Chains à surprendre son monde là où on ne l'attend pas.
L'atmosphère de cet EP ? Moins morbide que les autres créations du groupe, mais toujours aussi mélancolique. La mélodie est travaillée, ciselée pour nous mettre en émoi (je pense particulièrement à "Nutshell" où la voix de Staley est saisissante à en pleurer, contant le désespoir d'un homme qui préfère mourir plutôt que de perdre son âme, le tout sur un duo guitare-basse à la tonalité triste et fataliste).
On pourrait y rattacher "
Whale & Wasp", le seul instrumental de l'EP, avec sa guitare distorsion gémissante et son accompagnement au violon / violoncelle, "Don't Follow" avec son riff guitare proche d'une ballade de
Pink Floyd ("Mother" de l'album
The Wall) et ses soli d'harmonica fugaces mais sympas ou encore le nostalgique et légèrement psychédélique "
I Stay Away", distingué par un son clair et des bridges de slides et de distos, suivis du violon et de la viole soutenant l'ensemble et lui conférant de la profondeur, et un Layne Staley à la voix limpide criant le refrain avec résignation. En un mot magnifique !
A l'autre extrême, on trouve plutôt un son chaleureux, léger, moins triste mais empli de lassitude ou de passivité comme "Rotten Apple" et ses deux guitares alternant un riff doux et ténu avec des parties plus lourdes et wah-wah plaintifs, le tout sur les voix harmoniques et reposantes de Staley, Cantrell et Inez.
"
No Excuses", que certains ont dû chanter ou jouer sur GH : Metallica, est déjà moins grunge et plus dans le rock alternatif, donnant un coup de fouet et un peu de cette vigueur inhabituelle chez AIC.
L'air se siffle et se retient facilement. Le groove étrange de "Swing on This" avec ses breaks batterie-basse de jazz et son refrain plus metal est assez prenant et troublant, car si l'air est insouciant les paroles pointent le malaise des enfants en rupture avec leurs proches.
En gros,
Jar of Flies est un peu l'oeuvre salvatrice qui permit au groupe de
souffler un peu après le triomphe de
Dirt et le succès inattendu de
Facelift, évitant à la prometteuse formation de partir à la dérive. Un EP plus calme et posé qui ne trahit aucunement le talent de AIC et qui mérite d'être écouté.
Il est le calme de la tempête avant la lente descente aux enfers de Layne Staley, submergé par ses démons et l'héroïne.
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