Dans une période post-psychédélique bouillonnante, plusieurs groupes émergent et s’apprêtent à révolutionner le monde, une fois de plus. Parmi eux, une obscure formation de Detroit enregistre dans des conditions chaotiques, à la limite de l’émeute, un album en live, et sans le savoir est en train de faire un grand pas vers le punk, le hard rock et le heavy metal. Si 10 ans plus tard au moment de l’explosion du punk, le Motor
City 5, dit
MC5, se fera connaitre par ceux qu’il a influencé, en 1968, le groupe est totalement inconnu et souffre d’un mauvaise réputation auprès des labels à cause de ses idées révolutionnaires. Pourtant, le public venu assister à l’enregistrement de l’album est nombreux, sans doute curieux de découvrir un groupe qu’il devine déjà peu ordinaire, certains pressentant peut-être que le concert sera un moment historique à ne pas manquer.
Après un discours incitant ostensiblement à la révolte, le groupe balance d’emblée une reprise rock ‘n’ roll Ramblin’ Rose, rendue complètement folle par l’énergie des musiciens et du chanteur. Et ça ne fait que commencer, comment décrire la tornade de violence provoquée par
Kick Out the Jams. Devenu un des classiques fondateurs du punk et du metal, cette tuerie surpasse en agressivité tout ce qui existe à cette époque, que ce soit dans son chant hurlé, ses riffs brutaux ou sa rythmique lourde. Après avoir bluffé toute l’assistance, le groupe se permet d’en remettre une couche plus tard avec autant d’intensité, sur Borderline, encore plus rapide que
Kick Out the Jams et tout aussi brutale et lourde, une nouvelle tuerie qui a dû grandement secoué le public de l’époque et qui surprend l’auditer actuel par son avant-gardisme. D’autres tueries viennent compléter le tableau, mais souffrent d’une longueur plus importante qui s’acclimate difficilement avec leur caractère immédiat et abrupt, c’est un peu le cas de Come Together et de Rocket Reducer No.62, qui restent de gros morceaux, mais c’est surtout le cas de I Want You Right
Now, qui en plus d’être brouillon s’étale sur 6 minutes, ce qui est nettement trop. Et que dire de Starship, sorte d’expérimentation post-psychédélique glauque et encore plus brouillonne sur plus de 8 minutes, ici aussi le zapping parait inévitable. A côté de cette folie destructrice plus ou moins maitrisée, Motor
City Is Burning parait à côté de la plaque, et bien que dans une veine blues old school on ne peut plus conventionnelle, permet à l’audience de faire une pause parmi cette avalanche de son brutal et de chants hurlés auxquels elle n’était sans doute pas préparée.
Ce
Kick Out the Jams a beau être bancal et au 3/4 inaudible et brouillon, ses nombreuses tueries furieuses et l’efficacité de ses riffs en font un acte fondateur tellement en avance qu’il faudra attendre près de 10 pour que l’émergence du punk en montre l’héritage. Entre-temps, les prémices du heavy metal s’efforceront durant la décennie 1970 de faire fructifier l’élan de brutalité que le
MC5 a lancé à la face du monde, trop tôt pour pouvoir en profiter commercialement mais l’univers du rock et du metal a su plus tard reconnaitre son apport immense.
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