Slave to the Grind (Single)

Liste des groupes Hard-Rock Skid Row Slave to the Grind (Single)
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Nom du groupe Skid Row
Nom de l'album Slave to the Grind (Single)
Type Single
Date de parution 1991
Style MusicalHard-Rock
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Tracklist

7" TRACKLIST
1. Slave to the Grind
2. C'mon and Love Me
12" TRACKLIST (Rubberised sleeve)
1. Slave to the Grind
2. Creepshow
3. Beggar's Day
CD TRACKLIST
1. Slave to the Grind
2. Creepshow
3. C'mon and Love Me
4. Beggar's Day

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Skid Row


Chronique @ ZazPanzer

16 Mars 2013

Plus loin que la nuit et le jour…

J'aime beaucoup ce que Kessel disait des voyages : ils "ont ceci de merveilleux que leur enchantement commence avant le départ même. On ouvre les atlas, on rêve sur les cartes. On répète les noms magnifiques des villes inconnues..."

C'est beau.

En réalité, le metalhead est de nos jours bien plus pragmatique. A peine son billet d’avion réservé, trop excité pour se laisser aller au rêve, il ouvre immédiatement plusieurs fenêtres sur Google : il répertorie dans la première les disquaires de la ville dans laquelle il se rend, les situe par rapport à son hôtel dans la seconde et consulte évidemment dans la dernière ses contacts étrangers pour aller à la pêche aux infos sur d'éventuelles petites boutiques impossibles à trouver sur le Net.

Si la destination ne lui est pas inconnue, il s’accorde généralement une pause nostalgique en ouvrant le tiroir dans lequel il conserve les traces de ses passages précédents, jette tristement un œil sur les flyers des merveilleuses boutiques poussiéreuses qui faisaient autrefois son bonheur et repense aux disques qu'il associe à ses voyages. C’est d’ailleurs en retrouvant les pages jaunes recensant les disquaires londoniens, arrachées dans l'annuaire d'une chambre d'hôtel à une époque où Internet n’existait pas, que j’ai subitement eu envie de ressortir ce single de Skid Row, de palper sa pochette en skaï, et surtout de sentir ce parfum de faux-cuir mêlé à l'odeur du disque, ce parfum qui me rappellera toujours les minuscules sous-sols de Camden, les Music & Video Exchange de Notting Hill, mais aussi Hanway Street où je pouvais rester la journée entière à Vinyl Experience; et bien évidemment Soho, Berwick Street et ses incroyables échoppes coincées entre sex-shops et épiceries asiatiques qu'étaient entre autres Reckless Records et Sister Ray...

Sister Ray... Sister Ray n'est malheureusement plus aujourd'hui qu'une vulgaire et sinistre boutique mainstream qui fait tragiquement honte à son glorieux passé : jusqu'à la fin des 90s le propriétaire mit en effet un point d'honneur à bannir de ses bacs les albums courants pour les remplir uniquement de raretés, picture-discs, bootlegs et autres singles à tirage limité qui procuraient une joie intense et surréaliste aux collectionneurs acharnés. Inutile de vous dire que je faisais souvent la fermeture, me torturant le cerveau parce que mon portefeuille n'était pas à la hauteur de mes ambitions et reposant au dernier moment tel disque qu'il était pourtant inconcevable de laisser s'envoler, sachant très bien que je ne le reverrai peut-être jamais... Le patron, blasé par cette scène shakespearienne qu'il voyait rejoué en boucle quotidiennement, attendait poliment, patiemment, en tirant sur sa clope, que j'étale sur le comptoir mes trésors, les bébés que je venais d'adopter pour la vie, dont ce "Slave to the Grind", petit frère dans l'âme du mythique pressage similicuir de "No Remorse" de Motörhead et donc achat incontournable, puisque la beauté d'un single réside évidemment dans son esthétisme et qu'il n'y a pas plus esthétique que Skid Row.

Parce que Skid Row, c’est avant tout visuel et instantané. Skid Row, c’est un coup de foudre, un gang dont le jeune hardos de 14 ans tombe amoureux en hallucinant sur une photo de Ross Halfin. Skid Row, c’est le tatouage «Youth Gone Wild» de Baz qui t'annonce la couleur, putain toi non plus tu ne rentreras jamais dans leur système et tu enverras chier ton boss en costard-cravate; Skid Row c’est la chaîne de Bolan reliant son oreille à son nez sur laquelle tu fantasmes pendant la récré; putain promis juré, quand tu seras grand tu auras la même; Skid Row c’est la bad-boy-attitude ultime, le refus du compromis, l’adolescence éternelle, l’irresponsabilité personnifiée, la fête qui ne se termine pas; Skid Row c’est l’impressionnant sex-appeal de Baz qui te pousse à croire qu'avec des cheveux un peu plus longs tu pourras toi aussi déchaîner les pulsions sexuelles de la gente féminine; Skid Row, c’est le groupe qui te fait acheter HRM deux fois le même mois pour pouvoir archiver le premier et découper les photos du second pour les coller sur tes classeurs. Skid Row tu sens bien que c'est dangereux et que de toutes façons des potes de Mötley et des Guns respirent forcément la sincérité. Skid Row, c'est juste la vie dont tu rêves; le Jack qui se boit au goulot au petit matin, les filles faciles et surtout des riffs qui te collent la gueule dans le mur et un chanteur ultra-charismatique qui sait porter le fute en cuir.

Skid Row je savais avant d'en entendre la moindre note que ça allait être à la vie à la mort.

C'est comme ça que les rockstars gagnent leur vie : en rendant heureux comme des rois et fier comme des coqs des gamins qui achètent à un prix exorbitant un 45 tours 3 titres qui ne sert à rien !

Certes «Slave to the Grind» est bien évidemment une bombe. Du genre qui t’explose à la gueule dès que le diamant touche le sillon. Pas de quartiers ! Un mur du son te saute à la gorge et instaure une tension presque insoutenable grâce à des guitares ultra lourdes accordées en Ré qui te mettent à genoux. Le stress monte encore d'un cran avec le riff thrashy du couplet, sur lequel se pose une voix toute en retenue, montrant au Monde la suprématie de Baz, qui excelle autant dans les graves que les aigus. Le nœud coulant se resserre, tu n’en peux plus, et arrive alors le pré-refrain sur lequel la rage du canadien explose, c’est le soulagement, la catharsis, c’est trop bon, et tu ne peux que reprendre en chœur avec lui le refrain peut-être simple mais tellement fédérateur : can’t be king of the world if you’re Slave to the Grind ! Tuerie. On en oublie même un solo de Snake plus que moyen, et un son de grosse caisse qui a peut-être un peu vieilli.

La face B est par contre une gentille escroquerie, puisque Atlantic nous ressort «Creepshow», l’un des deux morceaux de l’album (avec «Mudkicker»), à mon avis un peu en dessous des dix autres qui sont simplement intouchables, accompagné d'un soi-disant inédit, «Beggar’s Day», qui figure pourtant sur le pressage US de "Slave to the Grind" en lieu et place du mythique "Get the Fuck Out", banni du disque par Atlantic qui voulait éviter un scandale puritain, et que donc tout fan qui se respecte connaissait déjà.

Attention ! "Creepshow" est loin d'être un mauvais morceau ! L'emploi des harmoniques artificielles, le rythme up-tempo bien groovy et les chœurs larger-than-life rappellent énormément le premier album, un petit côté funky en plus et une façon d'aborder le chant déjà différente. La signature old-school de Scotti Hill somme toute, qui représentait le côté conservateur du gang. "Beggar's Day" s'en rapproche d'ailleurs dans l'esprit. Composé par Baz, Bolan et Snake, le titre ne faisait pas l'unanimité dans le groupe : c'était l'un des morceaux préférés de Snake et Scotti, mais également de l'ami Phil Anselmo; et Baz le place encore régulièrement sur ses setlists aujourd'hui. Par contre Bolan ne le supportait pas et refusait catégoriquement de le jouer ! C'est à mon sens un très bon titre, mais qui m'apparaît avec "Creepshow" et "Mudkicker" comme une transition entre le Hard au son Heavy des débuts et le Heavy ultra lourd du second opus, caractérisé par une agressivité ayant sauté le Grand Canyon - même si dire que cet album flirte avec le Thrash me paraît exagéré. La musique de Skid Row évoluait, c'est un fait, et je ne serais pas surpris de savoir que cette triplette Creepshow-Mudkicker-Beggar's Day aient fait partie des premiers morceaux composés pour "Slave to the Grind", certains étant peut-être même des (excellentes) chutes de l'album éponyme. Scotti Hill appose d'ailleurs son nom sur deux de ces trois titres, alors que le reste du disque est signé par la paire de bourrins Snake/Bolan !

Un 12 pouces qui n'amène donc rien, à part le plaisir de le posséder, de le toucher, de le regarder, de le ranger et parfois d'en parler. Les disques sont au fond comparables aux grands voyages : ils ont ceci de merveilleux que leur enchantement commence avant l’écoute même. On ouvre les booklets, on rêve sur les photos. On répète à voix haute des paroles qu’on ne connaît parfois pas encore.

C'est beau.

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