Quelle fille, quelle représentante de la gente féminine dans les années 80 n’aurait pas souhaité faire honneur et passer une nuit torride avec le divin David Coverdale?
La sex-machine du hard n’est pourtant pas un homme facile. Après le siphonage qui avait eu lieu en 1982, encore une fois, ou comme d’habitude, devrait-on dire, il y a à nouveau du chambardement de line up avant et pendant la sortie du volume successeur au grandissime « Saints & Sinners » de 1982. Micky Moody, vexé de n’avoir obtenu que la co-écriture d’un seul titre « Slow an’ Easy », décide de faire ses valises. John Sykes (ex-
Thin Lizzy), son remplaçant au poste de guitariste ramène les siennes. Le bassiste Colin Hodgkinson, lui, est viré par Coverdale au profit de la recrue Neil Murray (ancien membre du groupe qui était parti lors du siphonage de 1982), peu avant la sortie de la version européenne de « Slide It in ».
Oui, il faut que je vous l’explique. Il y a eu deux versions de l’album éditées. Une version européenne, celle d’origine, et une version américaine. Le nouveau label de «
Whitesnake », Geffen, avait poussé à la création d’une version remixée de l’album pour les Etats-Unis, et cette fois avec les nouveaux membres Sykes et Murray au tableau. Peut être qu’une évolution dans le style musical est prévisible, qui sait. Les américains ont leurs exigences, et Coverdale fait pour la première fois confiance à Mel Galley dans la co-écriture de la moitié des titres. Mais il y a moins à appréhender niveau production. Martin « Doc » Birch est toujours aux commandes. Ce type a lui seul fait office de garantie.
« Saints & Sinners » est assez souvent entendu comme l’un des meilleurs disques de «
Whitesnake ». Que dire de « Slide It in »? Coverdale est tout simplement en train de se construire une légende. Une légende du sex and hard. Des hits à foison, qui envahiront les ondes des deux côtés de l’atlantique. Des morceaux? Non, des morsures aussi chatouillantes que des baisers au cou. Le serpent blanc a mordu sur « Saints & Sinners », le venin s’inocule sur « Slide It in ».
En comparaison du précédent, on remarque de suite un son plus calibré, frisant avec le FM. Ce n’est pas du tout inconfortable quand il n’en ressort pratiquement que des monuments, à commencer par le titre éponyme « Slide It in », emballant et jouissif (comme son clip). La voix du serpent Coverdale se contorsionne autour d’un rythme et d’un refrain explosif. Un hard regorgeant de vitalité, imposant, auquel on s’attacherait rapidement, comme sur l’idyllique «
Give Me More Time », assurant davantage dans la mélodie. Ce penchant FM se retrouve de manière manifeste sur le titre « Spit it Out ». La nonchalance et le balancement simpliste, sur des petits riffs répétitifs, reste assez efficaces, malgré un manque palpable que l’on pourrait y sentir.
L’auditeur pourra vite entrer en osmose sur un titre beaucoup plus convaincant. «
Love Ain’t no Stranger » a effectivement tout pour convaincre (c’est même parait-il, ce que Coverdale essaye de faire à la lecture des paroles). Le morceau s’ouvre délicatement sur un air romantique, avec les claviers de Jon Lord en toile de fond. Un vif sursaut se produit, et notre monsieur auquel on voudrait tout lui pardonner, se met dans tous ses états. C’est les palpitations d’une véritable passion que l’on éprouve qui s’entendent en musique.
Des titres faits pour le public et les radios américaines. On en a la confirmation avec une touche US dans le hard de «
Whitesnake ». Les riffs de guitare deviennent rugueux et bétonnés. C’est un constat flagrant avec « All or
Nothing », alors que celui-ci, étonnamment, ferait fortement penser à ce que l’on sera habitué à entendre chez « Dio ». Un chant puissant et asséché au même titre que le jeu de guitare. Les claviers de Jon Lord feront une apparition, marquant une pause, mais l’instrument a été plutôt sous-exploité dans l’album (une nouvelle frustration est à venir). Le hard US de l’opus, ne s’en tiendra pas qu’à ça. On le voit apparaître sur le remuant et groovy « Hungry for
Love ». Des coups de hanches qui persisteront aussi sur «
Standing in the Shadows », mais la voix de Coverdale se fait à cet endroit sensible, transie. La musique en est devenue assagie, d’apparence, car le morceau est également à ranger parmi les hits.
Il ne faut surtout pas oublier dans la liste des prises à l’américaine, le « Slow an’ Easy » co-écrit avec Micky Moody. Très blues dans sa musique, gospel au refrain. C’est presque l’Amérique profonde que l’on peut sentir avec à la tête du mouvement, un Coverdale devenu pasteur, mettant son chant en souffrance. Un chant qui imiterait même un certain
Robert Plant. Si, si!
La fibre britannique n’est pas entièrement occultée dans l’album. Certains titres auront même encore le privilège de sonner bien anglais, que ce soit au travers du rock haletant et feutré de l’intriguant « Gambler », plus encore avec «
Guilty of Love ». Ce dernier se capitonne dans un heavy rock enchanteur à la «
Thin Lizzy ». La relation avec ce groupe est d’ailleurs perceptible, que ce soit par ses riffs ou son refrain.
«
Slide in It » est à cataloguer dans les grands succès de «
Whitesnake » et offre les premiers disques platines de la formation. Le son a peut être perdu de sa nature britannique au profit d’une composition plus soignée, se rangeant sans problème dans les boîtes de diffusion radiophonique.
Le serpent blanc se laisse glisser, parcourant tranquillement ce que la nature a fait de plus beau, le corps d’une jeune femme évidemment.
17/20
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