Repérés par le label indépendant
Mute Records,
Depeche Mode, dont le nom a été inspiré d’une revue française, fait partie de cette vague synth pop qui sévit partout en Angleterre et qui s’apprête à rencontrer le succès. Le groupe livre en 1981 son premier album, rempli à ras-bord des influences électroniques des années 70, tels
Kraftwerk et d’autres groupes allemands. A l’époque la situation au sein du groupe était bien différente de celle qu’elle sera par la suite, en effet Vince Clarke est le principal compositeur et le groupe ne fait que se plier à sa volonté. Ses origines étant plus électroniques que new wave, il en résulte un album très synthétisé, très pop, et assez éloigné de ce que l’on connaitra du groupe par la suite. Clarke s’efforce de mêler la technologie de
Kraftwerk avec la légèreté des morceaux pop des Beach Boys, pour un résultat intéressant bien que par encore à la hauteur des
Black Celebration ou
Violator.
La musique de
Speak and Spell est quoiqu’il arrive pop, les airs naïfs et joyeux, bien que peu inventifs, de titres tels
New Life,
Just Can't Get Enough,
Dreaming of Me ou What's Your Name sont très séduisants et frisent même la dance pop par leur entrain. Si le ton parfois trop léger peut agacer les oreilles du connaisseur, il n’empêche qu’il y a de la créativité et un réel potentiel. I Sometimes Wish I Was Dead fait encore plus fort dans la petite mélodie au synthé, ça en devient presque trop léger pour être de la pop mais c’est finalement ce qui donne au titre son intérêt. Lorsque Clarke durcit le ton, il en résulte une techno à l’ancienne un peu lassante mais néanmoins inventive et qui digère à peu près l’apport de
Kraftwerk, avec des Boys Say Go!, Photographic ou l’instru Big Muff qui confirment que le
Depeche Mode de 1981 est avant tout un groupe de synthé plus qu’un groupe de new wave tel qu’il le sera à peine 2 ans plus tard. Étant quasiment le seul titre composé par Martin Gore (qui deviendra le compositeur attitré après le départ de Clarke), Tora! Tora! Tora! est sans doute le titre le plus proche des albums suivants, le synthé y est bien sur très présent mais dans un registre beaucoup moins techno et écrasant que dans les autres titres.
Speak and Spell est finalement intéressant dans l’ensemble, sortant sans aucun doute du lot parmi les innombrables groupes électroniques de la fin 70-début 80, la plupart ne valant pas la peine d’être écoutés. Les rythmiques sont typiques de la techno de l’époque, graves et répétitives, et la tonalité est très pop, la place laissée aux expériences est encore assez limitée et on peut dire que ce premier effort du groupe, ou du moins de Vince Clarke, est un bon début bien qu’il soit le seul album dans ce style et qu’il finisse par lasser par la facilité des synthés et la difficulté à varier les rythmiques. Après cet album qui connaitra un grand succès, Clark quittera ses partenaires pour former
Yazoo puis
Erasure, en continuant d’explorer les styles electro-pop et techno, tandis que les 3 membres restants de
Depeche Mode pourront enfin se libérer et exprimer leurs attirances plus new wave en diminuant progressivement l’apport des synthés et en développant des mélodies plus recherchées, faisant de ce
Speak and Spell un OVNI dans la future discographie du groupe, un OVNI qui ne vaut pas ses successeurs mais qui malgré tout contient des titres prometteurs et qui vaut la peine d’être écouté.
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