La déception de
Diamond Dogs ainsi qu’une addiction sévère à la cocaïne conduisait peu à peu
David Bowie dans le mur. Si cette addiction n’a pas été résolue, et que l’orientation funk/soul de
Young Americans avait de quoi dérouter, le caméléon semblait de nouveau d’attaque en 1976 pour trouver une suite à sa grandiose période glam. Entouré d’un matériel électronique moderne, tout en conservant des tonalités funky et soul, Bowie va composer cette année là l’un de ses albums les plus marquants
Station to Station, et s’il parait transfiguré par rapport à
Aladdin Sane ou Ziggy Stardust, le résultat n’en est pas moins impressionnant.
Station to Station le morceau-titre marque sans doute le virage le plus net vis-à-vis de son court passage soul, mené par une basse puissante et des envolées progressives monumentales, conjuguées à sa voix, désormais très grave, font de ce titre un vrai chef d’oeuvre de sa discographie. Avec
Golden Years, il renoue avec la soul, mais pas n’importe comment, en y ajoutant des touches électroniques variées, il offre un groove expérimental très original et inattendu. World on a Wing semble plutôt regarder du côté de son passé pop, les arrangements y sont rêveurs tandis que le piano de Roy Bittan fait des merveilles.
Stay est en revanche plus visionnaire, en combinant une ligne de bass post-funk à un rythme dansant et une voix profonde, il préfigure avec 2 ans d’avance l’explosion de la new wave. Comme toujours, derrière ces créations novatrices, Bowie réserve un plaisir plus immédiat, ici TVC15, où rarement il n’aura imprimé un groove aussi efficace, entre pop et soul, du grand art. Pour conclure il reprend le mythique Wild Is the Wind, la musique du film du même nom, et bien sur il démontre qu’il n’a rien perdu de ses qualités vocales plus épurées, transmettant parfaitement les émotions de l'originale.
3 ans d’errements, et voici que
David Bowie ressurgit, après avoir fait le deuil de sa période glam, il revient très fort en digérant l’influence soul/funk de
Young Americans et y ajoute un apport électronique novateur. Méconnaissable, à l’image de sa voix qui est descendue dans les graves tout en prenant du coffre, il retrouve sa place dans les sommets du rock expérimental et inaugure une second période faste.
Tu as raison ; c'est l'inauguration d'un deuxième sommet, si l'on veut, qui se distingue tout à fait par son audace, sa démesure et sa relative impénétrabilité (un côté non-commercial très marqué, bien loin du easy-listening d'un Young Americans).
Du coup, Station to Station paraît l'album de transition, jusqu'à son titre. Une transition entre le soul/funk radio-friendly et ce qu'on pourrait appeller un electro-rock mitoyen dans la veine de Brian Eno, qui d'ailleurs participe activement à la réalisation de la fameuse trilogie berlinoise. Avec Station to Station, on passe aussi par le disco et la pop.
C'est un album si complet, bouclé, abouti qu'on en oublie son aspect transitoire ; il devient plutôt, pour certains dont moi, une sorte d'incarnation unique d'un éclair de génie capté sur le vif, entre deux périodes moins dangeureuses, plus réfléchies, plus contrôlées (hormis, peut-être, le bordel - jouissif - qu'est Diamond Dogs)...
L'album définitif, donc, malgré sa position pivotale dans la discographie de Bowie. Son plus transcendant, avec Ziggy Stardust.
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