Strikes

ajouter les paroles de l'album
ajouter une chronique/commentaire
Ajouter un fichier audio
16/20
Nom du groupe Blackfoot
Nom de l'album Strikes
Type Album
Date de parution 1979
Labels Atco
Style MusicalRock Sudiste
Membres possèdant cet album19

Tracklist

1. Road Fever
2. I Got a Line on You
3. Left Turn on a Red Light
4. Pay My Due
5. Baby Blue
6. Wishing Well
7. Run and Hide
8. Train, Train (Prelude)
9. Train, Train
10. Highway Song

Acheter cet album

 $9.56  17,62 €  16,38 €  £12.56  $19.74  17,99 €  17,04 €
Spirit of Rock est soutenu par ses lecteurs. Quand vous achetez via nos liens commerciaux, le site peut gagner une commission

Blackfoot


Chronique @ ZazPanzer

27 Mai 2012

Keep It In The Family !

Imaginez votre Papa chéri débarquant sur votre lieu de travail à l'improviste, faisant de grands sourires à vos collègues en leur lâchant quelques anecdotes bien embarrassantes sur votre enfance, puis vous poussant gentiment de votre bureau pour y aller de son grain de sel sur la note de synthèse que vous êtes en train de rédiger pour votre boss, ou se mettant aux commandes de la machine que vous manipulez pour vous en expliquer le fonctionnement... Ouch ! Ce fut pourtant la fierté de Rickey Medlocke de faire apparaître son grand-père Shorty sur tous les albums de Blackfoot, et ce jusqu'à sa mort...

Oui, le jeune Rickey fait certainement, comme tout ado qui se respecte, des crises terribles à ses grands-parents qui l'élèvent, peut-être pour sécher les cours de sport de la Robert E. Lee High School de Jacksonville (Floride), dispensés par un certain Leonard Skinnerd, mais il n'a en tous cas pas à cacher sa guitare sous son lit ou à faire le mur pour aller donner un concert secret dans un des bars mal famés des quartiers Ouest.

Rickey a en effet un papy formidable du nom de Shorty Medlocke (1910-1982), descendant direct de la confédération indienne Blackfoot, composée de 4 tribus : les Pikuni, les Pikuni du Nord, les Blood et les Siksika. Shorty, dont certains fans de Lynyrd Skynyrd affirment malgré les démentis qu'il est le fameux Curtis Loew de "Second Helping", transmet à Rickey la culture de ses ancêtres, et, étant lui-même un musicien reconnu dans le milieu du Delta Blues, apprend surtout à son petit-fils, dès ses trois ans, à jouer du banjo. Le gamin est doué. À cinq ans, il ne quitte plus sa guitare, et à huit ans, Shorty l'engage dans son propre groupe en tant que batteur. Les années passent, Rickey apprend également à se servir d'un clavier et découvre qu'il est doué pour le chant. Logiquement, il décide de monter un groupe, et c'est au printemps 1969 (Rick a 19 ans) qu'il rencontre Greg T. Walker (bassiste), Jackson "Thunderfoot” Spires (batteur) et Charlie "Long Legs" Hargrett (guitariste new yorkais), avec qui il forme Fresh Garbage, puis Hammer.

"Les mecs, c'est les Indiens et le Juif qui vont jouer !" C'est en entendant ce cri du cœur, sorti tout droit de la bouche d'un poivrot enthousiaste, que Rickey, parti tenter sa chance à New York, comprend que le patronyme Hammer ne marquera pas les esprits des clients du bar topless de seconde zone dans lequel est prévu le concert du soir. Le gig suivant est donc donné sous le nom Blackfoot, dénomination rendant évidemment hommage aux origines indiennes de Medlocke (Sioux), Spires (Cherokee) et Walker (Eastern Creek).

En ce début d'année 1970, du haut de ses 20 ans, Rickey est arrogant et impatient. Le succès tardant à pointer le bout de son nez, il passe un coup de fil à un vieux pote de bahut, un certain Ronnie Van Zant, qui lui offre un job. Il met alors fin à l'aventure Blackfoot et retourne en Floride avec Greg, où les inséparables compères occuperont quelques mois les postes de batteur et bassiste du combo The One Percent, qui deviendra trois ans plus tard Lynyrd Skynyrd. Ce n'est que pendant l'été 1973, après maintes aventures, que Blackfoot se reforme finalement avec le line-up original. Deux albums sont enregistrés en 1975 et 1976 qui passent inaperçus malgré leurs qualités et d'incessants concerts.

Après ces années de vache maigre, la chance finit par sourire à Rickey en 1978, lorsqu'il rencontre Al Nalli, manager du groupe Brownsville Station. Si ce nom vous évoque vaguement quelque chose, c'est normal : leur hit de 1973 fut repris par Mötley Crüe en 1985, nous parlons bien de "Smokin' In The Boys Room" ! Al Nalli négocie donc un nouveau contrat pour Blackfoot chez Atco Records, et décide de produire le troisième opus du groupe chez lui, dans la ville d' Ann Arbor (Michigan). C'est le batteur de Brownsville Station, Henry Weck, qui est d'ailleurs chargé du son. Comme l'indique le nom de l'album "Blackfoot Strikes", les floridiens ont décidé de frapper fort. L'album a ouvertement des ambitions commerciales, ce qui explique certainement le fait qu'il contienne deux covers sur dix titres. Mais quelles reprises !

Si reprendre le "Wishing Well" de Free -à ne pas confondre avec celui de Terence Trent d'Arby- [une blague pour les vieux] est devenu banal pour tout groupe de Rock ayant quelques références musicales, Blackfoot est à ma connaissance le premier combo à avoir eu cette idée lumineuse, en tous cas à l'avoir enregistré en studio, et si quatre ans plus tard Gary Moore en immortalisa une version bien meilleure que celle de nos indiens, leur interprétation musclée reste saisissante, enterrant la plupart des futures variantes exécutées entre autres par Savatage, Rudi Pell, Pearl Jam, Styx, Bruce Dickinson, ou encore At Vance.

Quant à "I Got A Line On You", morceau de Spirit, groupe du mythique Randy California, extrait de l'album "The Family That Plays Together" (1969), repris également maintes fois, entre autres par Jeff Healey qui en fit une perle et Alice Cooper qui le massacra, à nouveau le groupe de Medlocke fait un carton plein, nous délivrant une interprétation particulièrement entraînante, simple et efficace, basée sur des handclaps et mettant à l'honneur la voix chaude de Rickey, qui ensorcèlerait n'importe quel cobra, y compris celui de la pochette, peut être légèrement flou à cause des Bloody Mary que Rickey avait commencé dès cette époque à s'envoyer au petit déjeuner.

La majorité des autres titres ("Road Fever", "Baby Blue", "Rund And Hide") sont caractérisés par un Rock sudiste énervé, à la limite du Hard Rock, qui devient dès cet album la marque de fabrique des Indiens, autant appréciés par les Rednecks fans de Lynyrd que par les hardos de l'époque, ce qui leur permet d'ailleurs de tourner avec plusieurs groupes issus de la NWOBHM, et même d'être invités sur scène par Iron Maiden avec qui ils joueront une reprise de "Tush" au festival de Reading 1982.

Cependant, c'est dans les ballades que Blackfoot excelle sur ce troisième opus, nous mettant à genoux avec deux titres fantastiques. "Left Turn On A Red Light" donne un nouveau sens au mot Mélancolie grâce à la fusion parfaite de cette musique sublime et des ses lyrics poétiques, traitant encore une fois du thème de la vie ratée, du virage que l'on aurait dû/pu prendre, et de ce que l'on voit tous les matins dans ce putain de miroir qu'on a envie de fracasser. Medlocke reprendra d'ailleurs la recette sur Marauder, avec "Diary Of A Workingman", composition similaire et pourtant tout aussi émouvante. Quant à "Highway Song", morceau épique au final dantesque, racontant la vie sur la Route et ses moments de solitude, c'est simplement sept minutes de jouissance pour tous les amateurs de guitare, et même si la structure du morceau est honteusement pompée sur le mythique "Freebird" des copains Lynyrd, sorti six ans auparavant sur "Pronounced 'Leh-'Nerd 'Skin-'Nerd", je m'attirerai la foudre des puristes en faisant part de mon avis, à savoir que cette chanson est encore plus réussie que celle des voisins à qui revient pourtant le mérite de l'antériorité chronologique.

Curieusement, c'est la chanson "Train, train" composée par Shorty et d'ailleurs reprise par Warrant en 1990, qui sera le premier succès des indiens, se classant 38ème du Billboard en octobre 1979, leur permettant de décrocher la première partie des Who sur la tournée catastrophique suivant la mort de Keith Moon. Bien que Blackfoot ne parvint jamais à grimper au sommet des charts comme l'espérait Rick qui était d'ailleurs prêt à vendre son âme pour cela, comme il le montra par la suite, la machine était lancée grâce à ce premier volet de la "trilogie animalière", à la fois classique dans son style, violent et commercial, qui finit par être certifié platine en avril 1986, et qui permit à Blackfoot de se tailler une redoutable réputation en Live, amplement méritée comme le montrent les archives de l'époque.

Ah les liens du sang... Sacrées et indestructibles, ces entraves peuvent pourtant souvent se révéler compliquées à l'adolescence... Au final chacun trace sa route, fait ses choix, se détachant bien souvent d'un carcan familial jugé en grandissant trop étroit ou trop éloigné d'horizons nouveaux auxquels la Vie n'a pas manqué de nous ouvrir... Puisse le Destin me permettre malgré tout de continuer à partager ce disque avec mon fils dans une dizaine d'années...

0 Commentaire

0 J'aime

Partager
    Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire