Parmi les sirènes qui nous détournent de notre route, certaines ont gardé la voix cristalline de
Kate Bush pour mieux nous attirer à elles. Même parmi les sirènes de l’Antiquité, au moins l’une d’entre elles devait chanter comme
Kate Bush, sa fille spirituelle. Et on savait dès les premières paroles de «
Moving », aux allures de poésie extrême-orientale, que la chanteuse ne trahirait jamais une qualité si essentiellement liée à sa personnalité artistique. « The Saxophone Song » lui offrait déjà, en supplément, l’antidote contre son propre narcissisme et l’ennui que ce dernier pourrait générer, car l’intérêt des chansons ne se limite jamais, chez elle, à la principale intéressée : ce sont de riches et prestigieuses collaborations, où elle rencontre des instrumentistes à sa hauteur pour donner le meilleur de chaque titre et encourager la réécoute de façon à nous en faire apprécier les moindres détails (Alan Skidmore a également travaillé, entre autres, avec
Van Morrison,
Soft Machine, John Surman et Chick Corea). Le piano, quant à lui, rapproche l’écoute de l’écriture, au plus près de l’intimité du projet ; «
Strange Phenomena » demeure symptomatique à cet égard. Plus colorés, « Kite » et sa complexité rythmique annoncent une folie créatrice qu’elle exploiterait pleinement avec l’album «
The Dreaming ». Le lyrisme de «
The Man with the Child in His Eyes », le refrain charismatique de «
Wuthering Heights », le rock de «
James and the Cold Gun », l’autarcie de « Feel It », l’intensité progressive de «
Oh to Be in Love » comptent parmi les nombreuses qualités de ce coup d’essai / coup de maîtresse qu’est «
The Kick Inside ». L’un des rares reproches que l’on ferait à
Kate Bush sur l’ensemble de son parcours, c’est de ne pas avoir exploré des genres musicaux plus techniques (néo-classicisme, jazz et metal) alors qu’elle en avait les capacités. Mais, même quand elle était moins en forme, elle a toujours écrit et interprété de belles chansons.
D. H. T.
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